Louis Velluet. Puisque jouer avec les mots est, tout autant que la voile, un sport à la mode, on nous pardonnera, j'espère, de nous embarquer pour des métaphores maritimes. Une Société de recherche et de formation comme l'Atelier et, sur certains points, comparable à ces grands voiliers de compétition qui enthousiasment les foules. Comme eux, elle trace sa route au large (mais pour découvrir les formes nouvelles des vérités éternelles), veillant à s'en écarter le moins possible. Poussée par le désir de savoir qui, comme les vents, souffle de façon capricieuse et pourtant irrésistible, elle avance selon un cap, maintenu par son gouvernail mais aussi par ses dérives (1). Ces dérives, notre bâtiment en compte deux symétriques et complémentaires. Toutes deux nous importent également, toutes deux nous garantissent notre avance dans la bonne direction : littérature (2) et Balint assurent une route rectiligne. La littérature, parce qu'elle conditionne une description exacte des phénomènes, parce qu'elle seule permet de saisir, à travers le choix du mot juste, la rigueur grammaticale et le support de l’étymologie, l'essentiel des manifestations du vivant dans lequel baigne le médecin de famille. Mais aussi, parce qu'à travers le jeu de la lettre, peut apparaître ce qui tient à l'inconscient. A l'inverse du jargon technico-scientifique qui, s'épurant pour atteindre le général, schématise, appauvrit la matière et finalement exclut l'affectif, l'écriture, surtout lorsqu'elle est sécrétée quasiment impulsivement, permet de transcrire ce qui est imprimé en nous et que nous ignorons. Ses détours, ses failles, ses incertitudes sont d'autant de preuves que l'inconscient la travaille, et par là, nous ramène à notre seconde dérive : le Balint, nom propre devenu si commun que personne ne sait plus très exactement ce qu'il recouvre, et, pour notre stabilité, l'autre pièce essentielle. C'est parce que la relation transférentielle se déploie d'une façon particulière entre les différents acteurs de la Médecine de Famille, c'est parce que les effets inconscients y modifient de façon spécifique l'approche du diagnostic, la mise en oeuvre de la thérapeutique et les variations évolutives que nous pouvons tracer un cadre théorique pour délimiter notre pratique. Les intuitions de Michaël Balint ont été dans une large mesure à l'origine de notre recherche, elles ont permis son développement. Si le travail des séminaires de l'Atelier exclut l'implication personnelle directe qui spécifie le fonctionnement des groupes Balint, il s'appuie sur des hypothèses balintiennes, elles-mêmes sous-tendues par les acquis scientifiques permis par la psychanalyse (c'est à dessein que je fais référence à la science). Ainsi donc, Balint et littérature nous prémunissent contre les écarts de route toujours possible et nous permettent d'exploiter au mieux les ressources hauturières de notre navire. Préservons donc avec soin nos dérives, sans elles nous risquerions d'errer éternellement sur des océans de platitudes. L.V. Notes : Dérive : 1) Déviation d'un navire par l'effet d'un courant ou du vent. 2) Aileron vertical immergé pour réduire la dérivation d'un navire. On notera la traduction dans le langage de l'ambivalence humaine primaire, déjà signalée par Freud : le mot illustre à la fois le risque de s'égarer et le moyens d'y parer. (Voir : « sur le sens opposé des mots originaires ». Sigmund Freud in « L'inquiétante étrangeté et autres essais ». Page 47 et suivante. Connaissance de l'inconscient. Gallimard.) Littérature : Première apparition du mot en 1120 (Psautier d'Oxford). Il prend alors le sens d'écriture rappelant ainsi son origine latine. Ce sens premier évoque un aspect à la fois artisanal et créatif de l'écriture bien conforme à la nature habituelle des productions des médecins de famille. Si nous savions ce que c'est que la littérature, nous saurions, du même coup, ce que c'est que la vie. Jean Rostand (carnet d'un biologiste).
Louis Velluet Voici maintenant plus de dix ans qu'existe « l'Atelier ». Il n'est pas inutile de parler de ceux qui l'ont fait et du travail qu'ils ont concrétisé à travers lui. Beaucoup s'y sont retrouvés parce que leur trajectoire était depuis longtemps commune, sans qu'ils s'en doutent. Bien avant 1979, « les gens de l'Atelier » étaient présents partout où la Médecine de Famille naissait sous de multiples formes : Quand se concevait, dans la difficulté, la définition européenne de notre discipline, au cours des années 70. Quand se fondaient les premiers groupes de Formation Continue homogènes. Quand se déposaient les premiers statuts de Sociétés Médicales purement généralistes. Quand se donnaient les premiers enseignements spécifiques en Faculté. Quand s'écrivaient les premiers textes de Médecine de Famille (et nous parierons volontiers que les gens de l'Atelier ne sont pas loin d'avoir été les premiers en écrire). Ils ont ainsi beaucoup travaillé, beaucoup écrit avant de se retrouver et après s'être trouvés. Souvent imités, rarement cités, ils ont continué sans se décourager. La plupart du temps dans le silence car la nature humaine étant ce qu'elle est, certains autres ont passé plus de temps à tenter de d'occulter leurs réalisations ou à tenter de les copier, qu'à développer leurs propres recherches. Qu'importe, laissons cela pour aller à l'essentiel : si la Médecine de Famille commence à exister, c'est pour une grande part aux gens de l'Atelier qu'elle le doit, si l'Atelier continue à exister, c'est pour rester le lieu où chacun qui entame une réflexion originale sur sa pratique pourra venir s'exprimer. Les gens de l'Atelier, c'est vous, c'est moi, ce sont tous ceux qui se reconnaissent et se reconnaîtront comme médecins de famille. Mais le temps qui s'écoule amène aussi son lot de tristesse : parmi les gens de l'Atelier, il y a ceux qui nous quittent malgré eux. Il est impossible d'écrire ce rappel du passé et cet appel à l'avenir sans nous arrêter un instant sur les pertes cruelles que les dernières semaines sont venues nous infliger. Pierre Guicheney, membre fondateur de l'Atelier restera dans notre mémoire comme le passionné qui nous aidait de toute sa science et de tout son dynamisme à théoriser notre spécialité. Immobilisé en pleine action, Alain Métrop, tout aussi passionné, nous apportait sa fougue et ses improvisations foisonnantes ; il nous laisse provisoirement, nous l'espérons, continuer sans lui. L'un et l'autre, à l'extrémité des âges, grands médecins de famille, ont contribué à faire de l'Atelier ce qu'il est.
Louis Velluet. Une fois n'est pas coutume, cet éditorial sera politique. Ne vous méprenez surtout pas sur la signification de ce terme, il s'agit bien de son sens premier et non du sens dévalué qu'on lui donne aujourd'hui : c'est l'organisation de la Cité qui est mise en question. Dans l'Athènes classique, les métèques affluaient de toute la Grèce. Artisans, industriels, commerçants, médecins, ils ne jouissaient pourtant d'aucun des droits des « vrais » citoyens, pas même de celui de posséder une maison en propre. Cependant leurs talents étaient grands et beaucoup d'entre eux ont contribué à la gloire et à la fortune d'Athènes. Dans notre Cité Médicale moderne comme dans l'Athènes classique, il y a deux sortes de citoyens. Les uns tiennent le haut du pavé et les autres sont ignorés, quelle que soit leur valeur. Le scandale est le même, mais pour des raisons différentes. D'une part, une faction très large des « vrais » citoyens médecins refusent de reconnaître cet apartheid. Hypocrisie, intérêts matériels ? Ce n'est pas ici le lieu d'en débattre. D'autre part, les représentants de ces métèques, loin de mettre en valeur ce que leur originalité et leur dynamisme apportent à toute la Cité semble quémander de l'Etat la place la plus effacée, présenter des revendications d'O.S., ce qui n'aurait rien de déshonorant en soi, si la communauté généraliste n'était pas faite de milliers de talents différents et originaux, comme si elle ne comptait pas, en réalité, toute une hiérarchie de cadres et même des patrons. Cette timidité, cette auto-dévalorisation sont le résultat d'une éducation médicale s'appuyant sur des principes erronés. C'est ainsi que l'on a pu voir, stimulés par la chaleur communicative des luttes, de jeunes internes et de jeunes chefs de clinique demander, extraordinaire prétention, a gagner deux fois ou même trois fois plus que des généralistes chevronnés. Ainsi donc, de jeunes hospitaliers, forts d'une culture médicale approfondie dans des domaines particuliers, se sont laissés aller à s'estimer au double ou au triple de la valeur de confrères dont l'expérience et le savoir spécifiques, acquis au fil des années, sont sans commune mesure avec les leurs. Certes, il ne faut pas voir dans ces excès l'effet de la malveillance mais simplement celui de l'ignorance. Il est tristement exact que la reconnaissance d'un médecin de famille ne peut être obtenue, jusqu'à ce jour, qu’au mépris de son propre savoir, de sa propre culture, dont pourtant les exigences sont comparables à celles de ses autres confrères, bien que de nature différentes. Que l'on rétribue selon leur demande des professionnels qui ont répondu à des exigences de qualification et de compétition sévères (et parfois même excessive) ne constitue un scandale que parce qu'on prétend maintenir les généralistes dans un Tiers-état dont nul ne peut émerger s'il ne consent a se défigurer en imitant une pratique qui n’est pas la sienne. Il est tout aussi vrai qu'un diplôme fut-il aussi prestigieux que celui de l'Internat ne constitue nullement une garantie de talent et de qualités morales, ni même d'aptitudes particulières à tout l'exercice médical. A l'inverse, la recherche personnelle, l'approfondissement d'un domaine original, la créativité, nous le voyons tous les jours dans le domaine des sciences ou de l'industrie, favorise l'éclosion de personnalités de femmes et d'hommes de grande valeur même s’ils sont au départ dépourvus de diplômes. Je regrette avoir rappeler, une fois encore, qu'après un certain nombre d'années de pratique et de réflexion d'un médecin de famille peut acquérir dans son domaine un savoir et une technique spécifiques, faire la preuve d'une valeur identique à celle de n'importe lequel de ses confrères hospitaliers ou spécialistes, quelle que soit leur position dans leur hiérarchie médicale. Il doit être honoré (le mot prend ici toute sa valeur) en conséquence. La question qui se pose est finalement celle-ci : peut-il exister dans notre métier une autre aristocratie que celle qui réunit le talent et les qualités morales ? Si vous pensez comme moi que la réponse est négative, il faut obtenir sans délais de ceux qui nous gouvernent que soit posée l’équation qui donnera à la Cité les chances de voir un jour pratiquer au profit de tous une médecine humaine, efficace et économique. Ecrivons, une fois encore, cette équation, elle est simple : généraliste = spécialiste.
Par Jean-François Authier. Je suis bien malade : depuis quelques années, j'ai « mal à ma visite ». Ce n'est pas, certes, une affection classée, identifiée avec sa pathogénie, sa physiopathologie, son anatomopathologie, son évolution, ses formes cliniques et son traitement et certains diront peut-être que ce n'est donc pas une maladie, n'empêche que moi, j'ai « mal à ma visite »... Bien sûr, je commence à être un vieux bonhomme et j'ai fait mes études de médecine à cheval sur les années 40 et 50. Les maîtres d'alors nous enseignaient une pratique si particulière qu'on la classerait parmi les M.E.P.: ils n'avaient pas honte, certains même s'en vantaient, de passer le plus clair de leur temps... à soigner des malades ! C'est dire ! Quelques-uns, de surcroît, étaient aussi des chercheurs : ils ont même, au passage, fait les découvertes qui nous ont conduit à la Médecine d'aujourd'hui. D'autres enseignaient : ils nous ont transmis leurs connaissances, leur savoir et leur savoir-faire. Mais tous, sans vergogne, se disaient Médecins, tous prétendaient que la Médecine est d'abord l'art de guérir, qu'elle se faisait et s'apprenait « au lit du malade ». Vous avez bien lu, on s'occupait même des malades couchés. Le temps essentiel de la pratique et de l'enseignement était la « visite au malade » et la journée d'hôpital se découpait en tranches dont les grands moments étaient la « visite » de l'interne et sa « contre-visite » le soir, celle de l'assistant qui l'épaulait dans les cas difficiles et enfin, point fort du temps hospitalier de la visite du Patron avec son cérémonial. Quand il s'agissait de nous apprendre ce que serait notre métier, tous ces maîtres, grands et petits, nous racontaient des cas qu'ils avaient connus en ville en allant voir des malades à domicile avec leurs confrères généralistes, élèves ou amis, qui sollicitaient leur avis et leurs conseils. Ces visites aux malades constituaient l'essentiel de notre pratique et nous nous y préparions durant toutes nos études : venir apporter assistance et réconfort aux patients qui souffrent, les soigner dans leur corps et leur esprit, leur donner notre temps, les guérir, parfois, les aider à vivre ou à mourir, selon, être là, enfin, quand ils ont ou croient avoir besoin de nous étaient des motivations que nous acceptions en toute naïveté, qui nous suffisaient... Comme elles suffisaient aux grands consultants dans la notoriété se comptait au nombre de kilomètres qu'ils acceptaient de faire pour aller examiner sur son lit le patient même impécunieux pour lequel on avait requis leur venue; les plus illustres se déplaçaient aussi bien pour de richissimes personnages qu'à l'appel de l'obscur médecin de banlieue que j'étais, venant nous donner, en leçons particulières, leurs magistrales « consultations au lit du malade ». Les premiers lâcheurs furent les accoucheurs -- car le mal nous vint des spécialistes -- qui, sous prétexte de sécurité, amenèrent les femmes en gésine dans les maternités. Sécurité ? Certes, quelques accidents sont évités plus facilement en clinique ou à l'hôpital... Tranquillité aussi: si l'on est médiocre, les affres de l'accouchement périlleux seront mieux supportés en équipe, puisque partagées, et les responsabilités diluées : « Non, ce n'est pas moi qui ai débranché le tuyau ! » Sécurité accrue enfin si l'obstétricien est à la pêche ; non seulement l'accouchement se fera dans des conditions acceptables, mais il pourra encore signer sa feuille de soins, ce qui n'est pas négligeable. Les Oto-rhinos ont vite suivi cette voie pour cause d'instrumentation plus sophistiquée et sans doute ont-ils raison : les otoscopes, lancettes et mèches de gaze doivent être de meilleure qualité au cabinet puisque, nous dit-on, les paracentèses et tamponnements ne peuvent plus se faire correctement que dans les hauts lieux de la médecine technique. Les cardiologues ont résisté plus longtemps et consentent encore le tracé à domicile qui décidera si l'hospitalisation est utile ou nécessaire... Certains cardiologues du moins, ceux, peut-être chez lesquels quelque malheureux patient est venu mourir, histoire de prouver qu'il est plus sûr de déplacer un médecin bien portant qu'un malade potentiel. Tous ces abandons de la « visite » à domicile se sont échelonnés dans les années 60. Le coup fatal lui fut porté par la disparition des consultants engloutis dans le plein-temps hospitalier où les malades ne sont plus que les intrus chronophages qui, si l'on n'y prenait garde, vous dévoreraient ce si précieux « temps-plein » (de quoi ? Pensée ? Recherche ? Enseignement ?) : que la vie hospitalo-universitaire sera belle, que la recherche serait fructueuse sans les malades ! Dès lors l'épidémie gagnait ; certains généralistes étaient touchés. On commençait à refuser les visites de nuit -- il fallut des tours de garde -- puis de jours, les lointaines, celles qui dérangeaient. Bien sûr, au début, cela sentait encore la maladie honteuse, on s'en excusait, on se cherchait de bonnes raisons... On en trouvait de mauvaises. Il y eût le matériel... « Je suis mieux équipé au cabinet » (mais de quel équipement disposent donc ces confrères qui ne puissent les suivre dans une voiture ?) Ou la « qualité de l'acte » puisque, sans doute, nous pensons moins intelligemment hors de notre territoire, à moins que notre touché ne perdre de sa finesse, que le paysage admiré au fond de l’anuscope ou du spéculum ne soit plus chatoyant au cabinet que chez le patient. On a encore évoqué la valeur de la relation médecin-malade et du suivi ; sans doute ce patient, sorti de son cadre familial et professionnel, lavé, torché, sapé de neuf qui vient déposer sur un bureau aseptisé sa maladie, ou son trouble relationnel sera-t-il mieux appréhendé que si l'on plongeait comme avant dans sa vie et son milieu. Les savants, pourtant, nous ont bien enseigné, qu'on ne pouvait toujours raisonnablement appliquer « in vivo » les résultats de l'observation « in vitro » ! Ma visite est bien malade, plus que mes patients... Que vaudra demain cet acte inférieur techniquement ? Ai-je encore moralement le droit d'aller, en cachette, voir quelques inconscients qui prétendent toujours me faire venir chez eux ? Ne serait-il pas plus raisonnable de rester au cabinet pour faire des certificats de bonne santé permettant la pratique des sports ou la reprise de l'école pour les enfants que mon voisin le pédiatre aura sauvés ? Pendant ce temps les femmes vont quérir la pilule chez le gynécologue (les accoucheurs sont depuis longtemps à la retraite) et les rhumatisants clopinent devant ma porte pour gagner le cabinet du rhumatologue, mon ami. Les cardiaques, lorsqu'ils vont bien, me laissent recopier, encore, l'ordonnance du cardiologue. Les dyspeptiques, dès qu'ils ont recraché les tuyaux qu'on leur a introduits par tous les orifices filent chez le psychiatre se faire consoler de n'avoir pas de cancer. Les autres, tous les autres, vont se faire faire ailleurs « autre chose », dont je ne suis évidemment pas le spécialiste et moi, si j'entends parler d'un malade, le dernier du canton sans doute, je n'oserais pas aller le voir, par crainte d'insuffisance, et je lui enverrai un « urgentiste » compétent avec une pleine camionnette d'appareils, de tubes et de zigoui-goui qui rendent un médecin efficient et lui permettent de sauver les vies humaines... J'aurais alors reconquis un si précieux « temps libre » qui me permettra de vous raconter ce qu'était la Médecine du temps que s'y rencontraient médecins et malades... En attendant, j'ai mal à ma visite, et je ne sais toujours pas comment ça se soigne !
Par Louis Velluet.
« La vie est un long fleuve tranquille » (Etienne Chatilliez) Choisir la médecine générale comme pratique, c'est accepter de vivre au jour le jour sur la houle du temps. Partagé entre la conviction d'avoir à s'appuyer à chaque moment sur des fragments de savoir indiscutables et la certitude des changements inéluctables à venir, le médecin de famille ne trouve ses amers que dans ce qui se tisse entre lui et ses patients dans la durée, dans ce qu'il entrevoit de leur manière d'être, de ce qu'ils peuvent recevoir dans l'instant, et de leurs possibilités évolutives. Aussi important que soit le bagage de savoir dont il est porteur au sortir de la faculté, il ne bénéficie donc au départ que d'un avantage relatif. C'est au temps de faire ensuite son oeuvre. Chaque patient, suivi au long des années, enrichit son médecin, non seulement d'un savoir complémentaire, mais aussi d'un savoir différent qui porte sur le sens de la vie. Dans la foule composite des médecins, c'est ce que beaucoup redoutent ou fuient. C'est pourtant ce que sa fonction d'accompagnement permet au généraliste d'acquérir peu à peu, s'il a le cœur bien accroché. C'est en cela que réside l'importance et la difficulté de son rôle. Il lui faut accepter de se tenir aux côtés des vieillards et de vivre avec eux jusqu'au bout de leur chemin sans se décourager : ainsi lisant Claude Fabre, vous y trouverez une illustration de ce que recouvre la notion « d'investissement mutuel ». Il lui faut faire l'effort de franchir les obstacles qui s'interposent entre lui et son malade hospitalisé : étudiant le récit de Benoît Raynal, vous saisirez l'importance de ce suivi à travers les ruptures dramatiques de l'intervention extérieure nécessaire. Il lui faut supporter de se laisser emporter par la dynamique psychothérapeutique qui naît inévitablement de la rencontre entre un patient et un médecin débarrassé de son armure idéologique : analysant la communication de Jean-Pierre Rageau, vous entreverrez pourquoi la formation des médecins de famille est l'enjeu de temps de convoitises. Il lui faut affronter les vieux démons de la rencontre sadomasochiste et du besoin de s'autodétruire : savourant Jean-François Authier, vous découvrirez, si vous ne le saviez déjà, que notre arsenal thérapeutique n'est pas toujours aussi triomphant que dans les émissions médicales télévisées. Il lui faut enfin peser soigneusement les affaires de sa pharmacopée : réfléchissons au texte de Jean-Michel Abib qui clôt ce numéro, vous rêverez sur les paradoxes du médicament, objet dont la chimie mystérieuse déborde les molécules. Ainsi est composé ce numéro qui parle du temps. Le temps du médecin et celui du patient qui s'entrecroisent et constituent la trame de nos existences. Nous l'avons fait pour vous avec soin, prenez le temps de le lire.
Il faut bien reconnaître que le monde médical est, par certains côtés, celui des faux - semblants : Un discours très conventionnel tend à rassembler sous la même manière une infinité de savoirs et de pratiques dont le seul point commun est d'être e xercés par des individus porteurs du label de Docteur en Médecine. Quelle distance pourtant entre l'exercice d'un chirurgien cardiaque, celui d’un médecin du travail, d'un biologiste ou d'un psychanalyste... Leur seul caractère commun est de disposer, à des degrés et dans des domaines différents, du pouvoir de modifier la vie physique, psychologique ou sociale de leurs concitoyens (encore n'est -ce même pas vrai pour les biologistes). Cette fiction de l'identité hante également l'esprit de beaucoup de méde cins généralistes qui cherchent sans espoir à concilier la disparité des dons, des aptitudes et des intérêts de ceux qui pratiquent sous cette étiquette. Quoi de commun pourtant entre celui qui souhaite s'en tenir à la médecine technique et celui qui se forme à la psychothérapie. L'acupuncteur et le praticien de campagne qui accouche encore ses patientes peuvent-ils être réellement comparés ? La recherche de l'identité répond sans doute à un besoin de contrôle et de réassurance. Soyons certains que si tous les médecins -- et même les princes qui nous enseignent -- étaient si assurés de leurs connaissances et de leurs techniques, ils accepteraient plus facilement d'entériner l'originalité de certaines pratiques. Ici ce n'est plus le faux-semblant qu'il s'agit mais de double langage. S'il existe des aspects caractéristiques, définissables scientifiquement, de la pratique de Médecin de Famille, tous ceux qui se disent généralistes ne les vivent pas et ne les pratiquent pas quotidiennement. Si par ailleurs les spécialistes hospitalo-universitaires ne manquent pas de proclamer en public l'unicité des pratiques et la connaissance qu'ils ont de notre métier (« je connais bien la médecine générale et j'ai remplacé un médecin de campagne pendant quinze jours pendant mon internat »), ils n'en sont pas moins fort dépourvus lorsque se discutent devant eux quelques définitions de base. La Médecine en général, et la Médecine Générale en particulier, se présentent donc comme une mosaïque de pratiques hétérogènes qu'il devient de plus en plus difficile de relier par des caractères communs. C'est pourquoi, puisque se rencontrent, depuis bientôt dix années, bon nombre de ceux qui l'enseignent, il a paru intéressant de choisir pour thème du VIIIème Séminaire de Pédagogie : la différence. On verra, lisant ce numéro, que ce n'était pas superflu. L'Atelier.
Il aura fallu arriver au treizième « Atelier » pour qu'une de nos préoccupations premières laisse apparaître son nom. Il est en effet un aspect de l'exercice quotidien qui reste encore mal étudié en dépit, ou peut-être en raison, de la diffusion des théories et pratiques psychanalytiques, qu'elles soient orthodoxes, lacaniennes ou qu'elles se veulent moins formelles comme le mouvement Balint. Nous voulons parler de la psychothérapie spécifique du médecin généraliste. Il est vrai que parmi les tendances citées, les effets de maîtrise aidant, bien peu a été fait pour laisser la parole aux praticiens eux-mêmes jusqu'à ce jour. C'est ce que propose de faire ce numéro dans lequel nous présentons trois réflexions différentes et complémentaires sur ce thème et un essai pédagogique original. Une fois rappelées par Louis Velluet, quelques définitions, essai de délimitation préalable du cadre théorique de notre sujet, c'est à Anne-Marie Reynolds que revient la tâche difficile de décrire, à partir de la clinique, les moments et les moyens de la psychothérapie du praticien. Michel About, quant à lui, s'intéresse à l'ouverture de l'espace verbal dans la consultation, espace thérapeutique qui permet d'importants remaniements chez le patient. Jean-Pierre Rageau enfin à rassemblé au profit des jeunes et moins jeunes les éléments de son expérience personnelle dans un travail réalisé pour l'U.F.R. de Bobigny, qui tente de concilier les exigences de la formation initiale et celles de la formation continue. « La psychothérapie de soutien en médecine générale » est son titre. Le terme de soutien qui a pour certains une connotation déplaisante doit être pris comme l'exacte traduction du mot anglais holding, utilisé par D.W.Winnicot. Référence est ainsi faite à un aménagement de la relation qui permet au patient de mener à bien, en sécurité, une remise en équilibre physique et psychique nécessaire. Ce soutien s'appuie, en Médecine Générale, sur un mode de transfert particulier, non limité dans le temps, accepté par le médecin, basé sur des éléments de réalité et, la plupart du temps, non interprété. Ces particularités, qui, dans les cas favorables, donnent au médecin dans les projections des patients le caractère d'une image parentale stable, suscitent des identifications pouvant modifier à terme leurs comportements devant la maladie. L'efficacité du praticien dépendra, de son aptitude à comprendre les transferts, leurs utilisations thérapeutiques possibles et leurs modifications éventuelles au cours des années (à commencer bien entendu par celles qui concernent ses propres réactions transférentielles). Ce bref regard jeté sur le sommaire de ce numéro permettra, nous l'espérons, d'aborder les textes qu'il contient plus facilement en ne perdant pas de vue qu'il s'agit là d'un des sujets les plus difficiles à traiter qui soit, sujet qui concerne non seulement l'efficacité mais l'existence même de la médecine générale. L'ATELIER
Par Anne-Marie Reynolds «... Les soldats, séduits par l'illusion, couraient vers cette eau imaginaire pour étancher la soif qui les dévorait. » Monge (citation de Littré) Il est en médecine générale ce que l'on pourrait appeler des mots écrans qui fonctionnent comme les souvenirs du même nom. Des mots dont le propre est de montrer, et en même temps, et peut-être surtout, de masquer l'important qu'il faut aller chercher en deçà d'eux. Ainsi en est-il de ce que l'on appelle couramment le « champ » de notre pratique. On peut, en effet, se demander si l'usage de cette métaphore terrienne n'absorbe pas les énergies de ceux qui ressentent périodiquement le besoin d'en définir le contenu, en les poussant, tout comme ces soldats de Bonaparte en Egypte, vers ce qui n'en serait que le reflet. A la réflexion, ce contenu ressemble beaucoup à ce que nous connaissons tous : le monstre du Loch'ness. Nous ne l'avons jamais vraiment vu, mais ce n'est pas vraiment comme si nous étions sûrs qu'il n'existe pas. Il a une forme dans notre esprit, toute prête à se montrer, mais pas complètement définie, volontiers mouvante, et personne ne l'a vue assez précisément pour pouvoir la décrire. Il est insaisissable. Il vient du fond des âges. Il n'a pas d'âge. Vous l'avez compris, il s'agit d'un fantasme. Du mien en l'occurence, mais ça n'empêche rien, les fantasmes ont un sens. Ils évoquent en même temps qu'ils dissimulent ce que l'on cherche parfois et que l'on peut découvrir derrière eux. Ce que l'on sait suffisamment être là pour essayer de l'identifier. Pour en connaître la nature et les limites. Pour pouvoir l'affronter sans crainte d'être piégé à tout moment, et en parler de façon à être entendu, faisant apparaître aux yeux de tous ce contenu enfin incontestable. Pour ne plus s'entendre questionner encore et encore : « Mais enfin que voulez-vous leur apprendre que nous ne pourrions pas leur enseigner nous-mêmes ? » Essayons donc d'éclairer notre propos en rapportant ici deux histoires courtes entendues dans un groupe de recherche pédagogique généraliste. Une femme d'âge moyen, déprimée, accepte de venir chaque semaine parler de ses difficultés à son médecin jusqu'au moment où celui-ci prononce le mot « psychothérapie ». La semaine suivante elle est absente, et par la suite elle ne revient pas. Plus tard, pourtant elle réapparaît à la consultation accompagnant sa fille qui vient demander, pour la première fois, que le médecin lui prescrive la pilule. Celui-ci revoit la fille à deux ou trois reprises. La mère est parfois présente, un jour elle signale qu'elle aurait eu un malaise. Pas n'importe où, devant un magasin « Materna ». Plus tard encore, elle revient avec une demande de pilule pour elle. Jusqu'alors son mari utilisait des préservatifs, l'un d'eux était défectueux. Le généraliste lui prescrit une pilule après les examens d'usage, mais différente de celle qu'il a prescrite à sa fille. Elle s'étonne : « pourquoi pas la même pour moi ? » Le médecin explique et les échanges continuent : « Comment vous entendez-vous avec votre fille ? » « Mal, elle me répond avec beaucoup d'insolence. » « Mais comment réagit votre mari ? » « Il ne lui dit rien mais à moi il dit : tu n'as qu'à laisser tomber ». Selon le médecin, la fille se présente assez bien, elle est grande. La mère est toute petite : « elle n'a pas de corps ». C'est ainsi qu'à travers ces démarches quotidiennes le médecin écoute et entend la suite du discours interrompu quelques mois plus tôt, repris en termes cette fois résolument médicaux, mais pas n'importe lesquels. La seconde histoire est celle d'une autre femme déprimée elle aussi, qui a perdu son mari quelques mois plus tôt. Elle a du mal à faire son deuil et vient chaque semaine en parler au médecin (le même) jusqu'au moment où celui-ci se rend compte que les choses ont changé. Elles se réinvestit dans son environnement, reprend goût à ses activités, et cependant continue à venir se plaindre et à égrener et ses souvenirs. Le médecin lui propose une prescription médicamenteuse symbolique : du Temesta, 1 à 3 mg par jour, moins si possible, insistant pour qu'elle fractionne elle-même ses comprimés, devenant ainsi son propre prescripteur. Ce qu'elle fait soigneusement. Notre confrère n'a pas agi en se fiant à sa seule intuition. Il savait pourquoi il prenait cette initiative. On pourrait conclure de ces deux courtes histoires que le contenu spécifique du champ de la pratique du généraliste n'est pas à rechercher seulement dans le cadre des sciences et techniques médicales ou paramédicales, dont il devrait avoir acquis nécessairement une certaine connaissance, mais dans la nature même du terrain auquel il les applique. Le terrain en médecine générale, c'est d'abord le patient qui le définit en utilisant l'acte médical à des niveaux différents, l'un en rapport avec sa demande immédiate, l'autre avec son besoin profond. La médecine peut décider autoritairement des limites qu'elle entend donner à l'acte mais elle ne peut pas limiter -- sauf à modifier strictement le champ de la pratique générale actuelle -- ce que le patient cherche à en faire.
Des mots qui se croisent sans toujours se rencontrer. Nous voulons à « l'Atelier », comme d'autres en d'autres lieux, écrire la médecine générale et nous nous étonnons parfois de ne pas nous faire entendre. Or, cette médecine, nous l'écrivons tous les jours dans les lettres que nous adressons aux spécialistes, comme ceux-ci écrivent leur médecine dans les réponses qu'ils nous font. Si quelques-uns d'entre nous avaient gardé les lettres qu'ils ont écrites et celles qu'ils ont reçues et qu'on puisse les publier côte à côte, quelles belles études en «double-sound » pourrions-nous faire ! En «triple-sound » même si nous avions enregistré et transcrit en plus le discours correspondant de nos malades. Je divague ainsi à propos d'une lettre que je viens de recevoir d'un confrère qui se dit comme moi (comme vous tous maintenant) à l'écoute de ses malades. La patiente était une femme encore jeune (c'est-à-dire de mon âge !) qui m'apportait après bien d'autres le récit de sa souffrance : « En physiologie », dit Littré, « toute sensation pénible ». L'impuissance où que je me trouvais, comme les confrères précédemment consultés, de la soulager, me faisait craindre un quelconque maladie que nous n'étions pas assez savants pour avoir identifiée : j'avais sollicité le secours d'un voyantologue éminent. L'éminent consulté me répond avoir fait à notre patiente tous les examens de rigueur, les autres également, avoir analysé ce qu'il sait analyser, radiographié le reste et même été voir du bout de son Olympus (modèle machin) ce qui se passait dans le tube digestif de notre malade exploré par ses deux extrémités. Il ne se passait d'ailleurs rien d'anormal dans les deux segments accessibles : on pouvait espérer qu'il en était de même pour le reste. Il concluait, le confrère et c’est cette phrase qui m'accroche : « Comme tu le penses, cette malade est une fonctionnelle ». Je ne m'arrête pas au fait qu'il m'accuse de penser : il me connaît bien et le mot a dû lui échapper sans intention malveillante. Mais « cette malade est une fonctionnelle » : je me prends à craindre qu'il ait voulu dire qu'elle n'avait rien, et peut-on dire de quelqu'un qu'il « n'a rien » ? Il n'a peut-être pas osé écrire « ta malade n'est pas malade », ce qui ne voudrait rien dire. Notons au passage, ce qui augmente mon trouble, qu'une phrase peut « ne vouloir rien dire ». Si elle est sans signification mais qu'elle ne peut pas, à ma connaissance « ne vouloir rien écrire », ce qui est écrit aurait donc toujours une signification : il va falloir se méfier ! Mais revenons à notre lettre qui est « écrite » et veut donc sans doute « dire » quelque chose. Ce mot « fonctionnel » qu'il m'accuse d'avoir pensé, quel sens lui donner ? Je me souviens de mes premières observations où l'on me faisait classer les éléments du diagnostic en signes fonctionnels (un paragraphe) que le patient nous délivrait plus ou moins facilement lors de l'interrogatoire et signes physiques (un paragraphe distinct) que nous mettions en évidence par notre examen. En y ajoutant les explorations complémentaires, nous débouchions sur un diagnostic et bien sûr un traitement. Le « fonctionnel » existe donc bien dans notre démarche diagnostique et thérapeutique traditionnelle. Pourquoi, accolé au terme de malade, ce fonctionnel prend-il une connotation péjorative ? Reprenons la démarche : le patient m'apporte ses signes fonctionnels, sa souffrance. Je l'examine et ne trouve aucun signe physique, aucune anomalie aux explorations complémentaires, pas de diagnostic... C'est-à-dire pas d'explication. Il souffre et je ne trouve rien à lui renvoyer : pas de réponse à sa souffrance, pas de réponse à son appel. Certes, je peux lui dire : « tu soufres mais tu n'es pas malade, c'est ton problème et non le mien. Apporte-moi une belle maladie et tu verras comment je saurai « la » soigner. » Et ce mot « fonctionnel » a finalement très bien « fonctionné ». Certes, je ne sais pas tout à fait ce qu’il signifie. Pas davantage le confrère qui l'a utilisé sans doute. Nous y pouvons cependant trouver les messages suivants : Il existerait plusieurs espèces de malades, certains se définissant comme n'ayant pas de maladie. Le savant, le spécialiste institutionnel me renvoie ce patient (ça, de toute façon, il lui faut l'être !) puisqu'il n'y a pas de maladie : donc rien à soigner, encore moins à guérir. De plus cet éminent spécialiste se trouve ni en échec par ce malade non malade. Il n'est pas prêt à lui pardonner... à moi non plus, peut-être, de l'avoir enfermé dans ses limites. Je dois m'en souvenir : il est des médecins qui soignent des maladies, ce qui soulage bien les patients d'ailleurs. Ca nous arrive aussi. Mais, lorsque ainsi, nous soignions une maladie et à la limite un malade, est-ce pour lui ou pour nous que nous travaillons ? Voyez la satisfaction que nous procure à tous le « beau malade ». Ici la relation a bien fonctionné, notre cerveau aussi, l'institution également. Guérit ou non, le malade a bien joué son rôle., il a été reconnu comme à l'armée, ce qui a permis au médecin de se reconnaître à son tour ! En attendant ce prochain « beau malade », je reste avec « ma » fonctionnelle, puisqu'on me la rend, celle-ci ! Je vais devoir lui avouer que nous ne comprenons rien à sa maladie, qu'à la limite elle n'est pas malade et ne peut donc espérer de guérison. Si je suis dans un bonjour, et elle aussi, nous conviendrons peut-être de que je peux comprendre, en tout cas deviner sa souffrance qui, partagée, sera moins lourde. Sacré fonctionnelle, va, voilà qu'elle nous ferait penser... si l'on y prenait garde.
Ecrire la médecine générale tient certes de la gageure puisque, comme elle rappellera au cours de la discussion, il s'agit de transmettre à travers la lettre, l'indicible de ce qui se passe dans la pratique du médecin de famille, au même titre que l'évident ou le commun. C'est ce défi qu'on relevé depuis quelques années un nombre grandissant de généralistes, enseignants ou pas. Partant de ce que certains continuent d'appeler dédaigneusement des « histoires de chasse » et dont Jean-François Authier démontre brillamment qu'elles ne sont ni plus ni moins que des observations de Médecine Générale, ils ont peu à peu progressé. Dissimulé derrière le personnel et, parfois, le caricatural, se tient l'essentiel. C'est un travail difficile que de le mettre à jour ; pourtant apparaissent aujourd'hui des modes d'expression écrits qui, se démarquant des stéréotypes universitaire, tendent à donner une image plus fidèle de la réalité de l'exercice quotidien. A travers eux devrait pouvoir commencer à s'assurer la transmission. A titre d'exemple, ce numéro contient deux textes dont l'un, la « Clinique de la fin de la vie en Médecine Générale », a déjà été présenté aux étudiants, le second : « L'interpellation corporelle » le sera prochainement. Dans un prochain Bulletin nous publierons également le travail très important que constitue « Le suivi en Médecine de Famille », point extrême d'avancée de notre travail. C'est ainsi que ce numéro 10 devrait répondre à vos souhaits en étant, comme le joueur qui assure cette fonction dans une équipe de football, le pivot, le point de passage des actions qui mènent au but : le développement d'une écriture originale.