Annie Catu-Pinault
Le lien entre blocage respiratoire et blocage de la parole a été rapidement évident. Nous avons d'abord entendu, avec O. Demonsant, l'intrusion d'une brutalité à couper le souffle d'une mère maltraitante depuis toujours et la colère qui ne peut pas se dire. B. Raynal nous a ensuite raconté la demande affective respective et maladroite, dans un couple fusionnel et en guerre permanente, la répétition des « crises » dans les générations successives dans cette famille où on ne parle pas et dans laquelle un nouveau-né est mort dans la suffocation.
M. Sabo nous a transporté dans la cage d'une femme qui ne sait pas se dire et qui tente de calmer ses angoisses par l'alcool puisque son mari ne sait pas lui ouvrir la porte. Son médecin a du mal lui donner un espace de parole pour l'aborder en profondeur, malgré son recours à l'hypnothèrapie.
Le déni comme mode de défense est illustré par le cas de C. Crozat dans lequel la patiente clame une enfance heureuse malgré ses consultations itératives pour des crises d'essoufflement évoquant une hyperventilation liée à des crises d'angoisse. Il faut beaucoup d'empathie pour tenter de faire baisser le pont levis afin d'accéder à la personne.
L'essoufflement est parfois la conséquence d'un épuisement face à un contexte de vie perpétuellement abandonnique et violent. Les vomissements qui les accompagnent dans ce récit font évoquer un antécédent d'agression sexuelle. C. De Carne aimerait tant que la patiente parvienne à dépasser tout le négatif en se centrant sur la vie future qui se présente plutôt bien. Mais le passé persiste à engluer le présent dans l'angoisse.
Il arrive que nous souhaitions sincèrement la mort d'un de nos patients, tellement leurs souffrances nous paraissent insupportables. Ceci s'avère très partagé devant les dyspnées d'insuffisance cardiorespiratoire très sévères dans lesquelles notre empathie est mise à rude épreuve. La patiente de M. Truchassou happe l'air depuis deux ans mais résiste. Ce dernier souffle chronique rend difficile le dialogue.
Enfin, notre experte cardiologue a participé à l'éclairage des atteintes cardiaques dans leur lien aux problèmes du cœur affectif, nous permettant d'introduire quelques références aux mécanismes psychosomatiques explicités ou démontrés dans la littérature. Ces hypothèses que le médecin se formulent pourraient être communiquées au patient, certes elles feraient alors interprétations mais peut-être aussi délivrance.