Les cas qui ont été évoqués relevaient de situations de handicaps forts éveillant dans nos auteurs les possibilités de maternage vis-à-vis de personnes non autonomes. Le centrage sur les personnages porteuses de handicap s’explique par la difficulté particulière à mettre en place la bientraitance dans ces situations : incompréhension, agacement, rejet, invisibilisation, banalisation, déni, mais aussi culpabilité de ne pas être suffisamment soignants, de ne pas sortir les patients de leur dépendance et/ou leur souffrance.
Que ce soit dans le cas d’une patiente gravement limitée dans ses relations sociales et affectives par une anorexie majeure, les adolescents présentant des troubles du développement affectif ou les patients âgés présentant des troubles cognitifs et ceux en fin de vie.
Comment être bientraitants lorsque nous sommes en difficulté par rapport à notre idéal de métier, lorsque la situation à laquelle nous sommes confrontée ne nous permet pas de mettre en œuvre nos compétences et notre savoir faire habituel, lorsque notre cerveau ne recevra pas, en retour de l’énergie, du temps et de l’empathie accordée, la récompense dont il a besoin pour être en équilibre. Nous ne sommes pas des superhéros, nous sommes des êtres humains en recherche d’homéostasie, portés par une histoire particulière à nous tourner vers le soin de l’autre.
La bientraitance c’est aussi prendre conscience que si le patient ne choisit pas la solution qui nous parait idéale pour résoudre ses problèmes, c’est qu’elle ne répond pas à ses attentes, besoins et craintes. Le patient nous parait parfois ambivalent ou incohérent car il n’est pas égal à lui-même dans tous les moments et les aspects de sa vie. Il ne faut pas juger trop vite qu’il est capable, incapable, désireux ou non désireux de résoudre un problème ou réaliser une action. Restons ouvert pour l’aider à réfléchir, à élaborer.
Le refus de soin est lui aussi une situation qui met à l’épreuve nos capacités de bientraitance car il nous déstabilise dans ce que nous croyons être notre rôle, surtout lorsque le patient semble n’en faire qu’à sa tête en se reposant sur la toute puissance de l’hôpital et des thérapeutiques médicamenteuses. Pourtant quoi de plus humain que de vouloir éviter la souffrance même quand on ne tient plus vraiment à la vie.
Comme toujours, la résonance a pointé son nez avec son cortège de blocages et d’émotions parfois inattendues nous permettant de repérer ces vécus et ces représentations qui nous amènent dans des positions plus profanes que professionnelles.